Newsletter

Retour sur la conférence :
« La laïcité, histoire d’une sigularité française »

Le 9 décembre dernier à l’initiative de l’Institut Kervégan et du Comité Laïcité République des Pays de la Loire, s’est déroulé une conférence portant sur la genèse de la loi de 1905 qui instaure le principe de laïcité, unique dans le monde. Ce fût l’occasion de rappeler l’histoire de la Laïcité en France mais aussi de la replacer dans son contexte actuel.

Les 3 invités à la fois experts et défenseurs de cette Laïcité ont su éclairer ce sujet en retraçant un panorama complet des enjeux et des risques pour la laïcité : Babacar Lame, Président du Comité Laïcité République Pays de la Loire ; Yannick Guin, Professeur honoraire des Universités, Histoire du Droit, des Institutions, et des Idées politiques à la Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Nantes et Martine Cerf, Secrétaire Générale de EGALE (Égalité Laïcité Europe). Retour sur une conférence qui met en lumière, un « génie français ».

La Laïcité : une histoire oubliée

Partant du constat qu’aujourd’hui, 40% des collégiens français placent la loi religieuse au-dessus de la loi de la République, l’école et la transmission de la laïcité à travers son histoire est en questionnement. C’est un fait, beaucoup d’enseignants témoignent de n’avoir jamais reçu de formation concernant la laïcité. En effet, le principe de laïcité, censé être acquis et ancré dans notre société est depuis l’après-guerre de moins en moins transmis et ses fondements bien méconnus de nos concitoyens.

Quand on évoque la laïcité, c’est la Loi de 1905 qui revient dans nos esprits. Mais cette loi n’est pas apparue comme par magie, elle représente le fruit d’un long processus de sécularisation, enclenché dès le 13e siècle ayant pour objectif de retrouver une paix civile, le territoire français étant marqué par beaucoup de guerres de religions, notamment entre catholiques et protestants. Bien que le catholicisme reste majoritaire en France, la monarchie va peu à peu s’autonomiser vis-à-vis du Vatican montrant une libération de la pensée.

La loi de 1905 une révolution douce

Cette libération de la pensée s’observe également dans la société. En effet, l’étude des registres paroissiaux de l’époque montre que la France était le premier pays à utiliser la contraception et au 18e siècle, la moitié des ouvrages présents dans les foyers français évoquaient les idées des lumières tandis qu’un siècle plus tôt on y trouvait principalement des ouvrages à portée biblique. Le 18e siècle, période des Lumières, met en place de réelles avancées sur le plan religieux, particulièrement avec la Déclaration de l’Homme et du Citoyen de 1789 ou encore avec l’Édit de Turgot, dit « Édit de Tolérance » proclamé en 1785 qui autorise notamment les mariages mixtes entre deux religions.

La loi de 1905 fondements d’un pacte social à la francaise

1905 apparait finalement comme une finalité plutôt qu’un changement majeur. Revenons sur les principes marquant de cette Loi. Tout d’abord, contrairement à ce que l’on pourrait penser, la « Loi de séparation entre l’Église et l’État », ne s’applique pas seulement à l’Église romaine mais à toutes les religions, y compris les deux autres religions monothéistes : le judaïsme et l’islam ; cela est stipulé au sein de l’article deux de la loi et représente un point très important : La laïcité permet la liberté par l’égalité de tous devant l’État.

L’article 31 de la loi de 1905, moins connu du grand public mérite également une grande attention : « Sont punis d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ceux qui, soit par menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d’exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, ont agi en vue de le déterminer à exercer ou à s’abstenir d’exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d’une association cultuelle, à contribuer ou à s’abstenir de contribuer aux frais d’un culte. »
Cet article, qui reprend l’article 260 du code pénal ; un article déjà présent avant 1905 par ailleurs, renforce encore le fait que 1905 ne soit que l’aboutissement d’un long combat dans l’instauration de la liberté de conscience. Une notion primordiale qui implique pour l’individu, la liberté de croire ou de ne pas croire. Peu importe sa décision, on ne peut lui porter atteinte ou faire pression sur lui en raison de ce choix.

Une singularité ébranlée à préserver

C’est notamment ce qui rend la laïcité française si singulière, elle protège les croyants et les non-croyants en garantissant une égalité de tous devant l’État. En plaçant chaque citoyen comme un individu à part entière aux yeux de l’État, cela permet de préserver l’égalité ainsi que les libertés individuelles. A l’inverse, en favorisant les communautarismes comme dans certains pays anglo-saxons, les doctrines religieuses engendrent des différences de traitement entre les individus. La législation pouvant privilégier les lois religieuses plutôt que celles de l’État créant ainsi une inégalité de justice. La Laïcité a pour but en France, de protéger les citoyens des différents pouvoirs des religions ainsi que des communautarismes. Il est toujours bon de le rappeler, le souhaite de l’état n’est pas de bannir les religions, la laïcité n’est en aucun cas synonyme d’athéisme, du moins, pas en France.

Cette conférence, montre que les problèmes liés à la laïcité aujourd’hui, sont principalement dus à un manque de connaissances de chacun d’entre nous sur un principe essentiel et singulier de notre pays : le génie de la laïcité.

Pour aller plus loin

Revoir : Vidéos de la conférence